Cy Twombly au Centre Pompidou - La vie sensible de l’écriture
Coronation of Sesostris (2000) - Part VI:
acrylique, bâton de peinture, crayon à la cire, mine de plomb sur toile (206,1 x 156,5 cm).
Pinault Collection. © Pinault Collection / Photo Robert Mc Keever.
Fifty Days at Iliam : Heroes of the Acheans, 1978
Partie II : huile, crayon à l’huile, mine de plomb sur toile (191,8 x 149,9 cm)
Philadelphia Museum of Art, Philadelphie,
gift (by exchange) of Samuel S. White 3rd and Vera White, 1989-90-2
Partie II : huile, crayon à l’huile, mine de plomb sur toile (191,8 x 149,9 cm)
Philadelphia Museum of Art, Philadelphie,
gift (by exchange) of Samuel S. White 3rd and Vera White, 1989-90-2
Prélude — Une main ridée tient un livre, une biographie de John Keats, Posthumous Keats, dont la couverture reproduit en transparence la photographie en noir et blanc d’un portrait peint de profil du poète anglais. Presque l’apparence du masque mortuaire de Keats, décédé à Rome le 23 février 1821 et qui y fut enterré. Cette main saisie fugacement est celle de Cy Twombly, filmée par Tacita Dean, en 2011. Edwin Parker, pellicule 16 mm de 29 minutes, de l’artiste britannique, suit, observe, Twombly dans ce qu'elle ignore être les derniers moments de la vie du peintre, dans son atelier de Lexington, en Virginie. Il y eut été délicat et c'eut faire preuve d’une intelligence de l’œuvre et de l’artiste que de montrer ce film de Tacita Dean, dans un lieu de cette exposition rétrospective présentée au Centre Pompidou. C’eut faire preuve d’une intime compréhension des liens sensuels et charnels, jouissifs, de Twombly à l’écriture, bien sûr, mais à la poésie — celle du chant homérique, celle du fragment saphique, des Métamorphoses ovidiennes ou de l’ode lyrique du romantisme anglais nourri des antiques héros... (des sonnets et stances de Byron à Keats. L’un des premiers sonnets de l’auteur d’Endymion, À la première lecture de l’Homère de Chapman, composé en 1816, le fut à la suite d’une première lecture de l’Odyssée, dans la traduction anglaise du XVIIe siècle de George Chapman): nous entrons avec Twombly dans une boucle poétique, occidentale, comme une incessante reprise et retour des temps. Dans une boucle de noms communs et des noms mythiques, mêlés, signes de l’épopée poétique plastique de Twombly.
La question n’est pas tant de savoir ce que vient faire l’écriture, la poésie dans un tableau ou un dessin ou un pastel de Twombly — ce serait oublier que peinture et poésie ont toujours eu maille à partir sinon depuis la charge platonicienne du Livre X de la République, mais à tout le moins depuis la formule d’Horace dans son Art poétique, « la poésie est comme la peinture », si allègrement détournée à la Renaissance, qui inscrivit la représentation picturale sous le régime de ce Ut pictura poesis — que de regarder comment elle y vient, comment elles y viennent, quel(s) en est/sont leur(s) espace (s) sur la feuille et dans les calques des collages, que sont ces noms occupant la place et quels en sont les destinataires. Cy Twombly étend ou épand l’écriture, dans la ligne vague et rapide, ou dans le tracé vif d’un mot, qui semble recouvrir la forme d’une signature, qui vit d’une main de peintre dans les pas de celle de poètes. L’écriture se gonfle ou se ramasse, elle est pulsion et détente, elle travaille, use, rature, implique, essouffle, distend la surface. L’écriture est un organe vivant, puissant et fragile. et le blanc maculé est son royaume ou sa démocratie...
Achilles Mourning the Death of Patroclus, 1962. Huile, mine de plomb sur toile (259 x 309 cm)
Collection Centre Pompidou, Paris. © Centre Pompidou / P. Migeat / Dist. RMN - ADAGP.
Apollo (1975). Pastel à l’huile et mine de plomb sur papier (150 x 134 cm).
Cy Twombly Fondation. © Cy Twombly Fondation, courtesy Archives Nicola Del Roscio.
© Photo : Mimmo Capone.
Venus (1975). Pastel à l’huile et mine de plomb sur papier (150 x 134 cm).
Cy Twombly Fondation. © Cy Twombly Fondation, courtesy Archives Nicola Del Roscio.
© Photo : Mimmo Capone.
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