Note de marge: Les Fonds régionaux d'art contemporain, du principe de capillarité au principe d'architecture.

 Frac Provence-Alpes-Côte d'Azur -
Maquette présentée dans l'exposition «Nouvelles architectures-
fonds régionaux d'art contemporain» -
Forum du Centre Georges-Pompidou.
Architectes Kengo Kuma&Associates.

          Débuter la période anniversaire des 30 ans des Frac (soit les Fonds régionaux d'art contemporain) par cette exposition des maquettes des futurs bâtiments des Frac Bretagne (en fait, le seul bâtiment achevé, et inauguré le 5 juillet dernier), Nord-Pas-de-Calais, Franche-Comté,  Centre, Provence-Alpes-Côte d'Azur, et Aquitaine, relève du paradoxe pour un projet initial, conçu au début des années 80, qui se définissait uniquement comme instrument de diffusion d'une collection contemporaine en constant devenir et qui devait irriguer, infiltrer, innerver des territoires et des lieux non artistiques ou a-artistiques (quoique cette notion est bien sûr à débattre). Soutien à la création contemporaine sous toutes ses formes et tous ses médiums, mais surtout, dans le cadre de la décentralisation mise en place par le premier gouvernement socialiste de Pierre Mauroy, sortir d'une «domination» régalienne et parisienne en matière d'acquisitions des œuvres et parer à un «désert français artistique». Une collection sans lieu, presque une collection précaire, indécise, d'humeur du temps, qui n'avait que pour espace celui de l'espace public et collectif, qui n'avait que pour espace, aussi, celui intime, souterrain, privé, d'une relation inédite avec des hommes et des femmes bien souvent qualifiés de non initiés. C'était cela: une relation mouvante, fragile, éphémère, surprenante pouvait s'imaginer, s'inventer, s'instaurer et se défaire. Un acte artistique, en somme.
           La sédentarité a depuis une dizaine d'années (les années 2000, pour faire vite), maintenant, assis les vingt-deux Fonds régionaux d'art contemporain. Aujourd'hui, c'est l'enveloppe architecturale qui fascine dans les maquettes présentées à l'occasion de cette exposition ficelée au cœur du Forum du Centre Pompidou en une scénographie linéaire, plane, rasante au regard, et égalitaire. Peut-être ne retiendra-t-on que les noms prestigieux des architectes internationaux qui ont été sélectionnés, ne discutera-t-on que des formes et des technologies mises en œuvre pour répondre aux fonctions et aux évolutions (notamment celles muséales de la réserve et de la conservation) d'un Frac, au lieu d'implantation qui induit une réflexion sur la captation de la lumière extérieure, l'inscription dans le paysage urbain ou péri-urbain, les aménagements connexes de convivialité (un restaurant, par exemple). Mais, peut-être, peut-on également interroger l'hybridation qui se produit aujourd'hui entre des architectures dominantes, des collections publiques qui s'enrichissent depuis trente ans et des missions qui demeurent inchangées de diffusion et de médiatisation? Réinterroger la notion d'échange et de relation... S'agit-il tant de venir au Frac comme nous nous rendons au musée (rappelons à ceux qui parlent de «nouveaux musées» que s'il y a une collection permanente, il n'y a pas de salles dédiées à cette collection. Le Frac est dans la temporalité courte et passagère de l'exposition), ou les Frac n'étaient-ils pas la possibilité singulière de croiser l'événement artistique dans un autre type de récit, dans une autre géographie.
Et, face à ces bâtiments à l'excellence architecturale indéniable, interroger et ré-interroger la fonction politique de ces Frac comme «vitrines» et symboles matériels des choix et des orientations culturels des élus régionaux.


Frac Franche-Comté. Architecte Kengo Kuma & Associated.



Frac Centre - Architecte Jakob+MacFarlane.

Frac Bretagne. Architectes Odile Decq et Benoît Cornette.

Frac Nord-Pas-de-Calais. Architectes Lacaton & Vassal.

Frac Aquitaine. Architectes BIG (Bjarke Ingels Group)
& FREAKS freearchitects.

 Photos: DR.

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