Jours de Klee, 2 - Centre Pompidou, Paris
Paul Klee, Angelus Novus, 1920 (© The Israel Museum, Jerusalem)
«Car le beau n’est que le commencement du terrible,
ce que tout juste nous pouvons supporter
ce que tout juste nous pouvons supporter
et nous l’admirons tant parce qu’il dédaigne
de nous détruire.
de nous détruire.
Tout ange est terrible.»
Rainer Maria Rilke, Première Élégie, Les Élégies de Duino (1912-1922)
Dernière semaine de l’exposition Paul Klee, L’Ironie à l’œuvre, présentée depuis le 6 avril au Centre Pompidou et qui fermera le 1er août sous la figure de l’Ange militant... Quant à l’Angelus Novus, il n'est plus visible depuis juin. Enfin, il est dans un visible de fac- similé quasi sépia. Il faut le protéger désormais, le conserver dans sa réserve muséale du Musée Israël, à Jérusalem. Alors il n’a subsisté dans l’exposition que sous cette forme de copie photographique. Il faut le préserver. Pourquoi? Pour qui? Pour quels autres temps de terreur? Les morts sont morts. De nos erreurs, de nos inconstances européennes. De nos complaisances occidentales. De nos oublis coloniaux. De notre impuissance d’invention de sociétés démocratiques. Paul Klee nous laisse seul-e-s avec nos « sombres temps » répétés. Autrement. L’exposition passe selon l’exigence des ordres contemporains. Ignorance de l’histoire. Comment pourrions-nous, dans cette contrainte, ne serait-ce que quelques minutes humaines, retenir le dessin, le tableau, l’aquarelle, les sculptures étranges, petites, dansantes? Fragilité des œuvres et de leur matériau. Klee nous a appris cela, cette promesse de fragilité. Klee fut quelques semaines ou est redevenu quelques semaines une alerte de conscience. Il n’est point besoin de lanceur d’alerte, cette face virtuelle d’une réalité surprise par un tragique renégocié avec l’actualité et l’anonyme de noms tenus au silence. Rainer Maria Rilke nous avait déjà prévenus, en 1912, dans la Première Élégie, « tout ange est terrible ». Paul Klee nous renvoie aux yeux narquois de l’ange, à ce regard déjà au-delà de l’inquiétude qu’il sculpte en 1915, au-delà de la ligne de mort, que nous avons sans cesse dédaignée.
L’exposition passe, et nous ne le voudrions pas. Nous devons continuer de vivre après l’ange, et sa terrible présence, et sa terrible absence. Ou sa terrible copie.
Fac-similé de l’Ange... Centre Pompidou, Paris.
... Inquiétude de la pensée (Unruhe des Gedanken).
Sculpture en plâtre rehaussée à l’huile, 1915.
(La Mort déguisée en momie), sculpture en plâtre rehaussée à l’huile, 1915.
2. Kamelskopf (Tête de chameau), sculpture en plâtre rehaussée à l’huile, 1915.
© photographies prises le 1er août 2016, dernier jour de l’exposition Paul Klee, l’ironie à l’œuvre.
Commentaires
Enregistrer un commentaire